Création d'une SCI : constitution, gouvernance et fiscalité

09 avril 2011

Les associés

La SCI doit comporter plusieurs associés, au minimum deux, qui peuvent être des personnes physiques ou morales (autres sociétés, associations ... ).

Aucune capacité spécifique n'est requise pour être associé d'une SCI. Aussi peuvent devenir associés des mineurs, des personnes possédant une nationalité étrangère, des héritiers, des époux quel que soit leur régime matrimonial. S'agissant des mineurs non émancipés, on veillera à ce que leur apport soit autorisé par ses représentants légaux et le cas échéant par le juge des tutelles.

Le capital social

La SCI se range dans la catégorie des sociétés à risque illimité, ce qui signifie que les créanciers peuvent agir directement contre les associés en recouvrement de leur créance, sous réserve d'avoir vainement poursuivi la SCI au préalable. Cette règle explique que la loi ne prévoit pas de capital social minimum. Il est donc nécessaire qu'il y ait un capital social, représentant la somme des apports des fondateurs, mais son montant est librement décidé, et sa libération, c'est-à-dire son versement effectif à la SCI, relève des statuts (proportion, périodicité ..). En pratique, deux cas de figure se rencontrent :

- soit la SCI est constituée postérieurement à l'acquisition du patrimoine immobilier et ce dernier sera apporté à la société; le capital social sera alors égal au minimum à la valeur des immeubles apportés;

- soit la SCI est constituée « à blanc » avec un faible capital social et les immeubles seront acquis ultérieurement par la société. Dans ce dernier cas, on prendra garde à ne pas se laisser piéger par les plus-values en cas de cession des parts; en effet, si un associé cède ses parts quelques années après la constitution de la SCI, la plus-value brute sera calculée par différence entre la valeur des parts au jour de la cession, représentant une partie de la valeur de l'immeuble acquis, et la valeur de souscription de ces mêmes parts, soit une valeur très faible.

Le capital social est divisé en autant de parts que les statuts le prévoient. En principe, le nombre de parts attribué à chaque associé est proportionnel à l'apport qu'il a réalisé. Il demeure possible de déroger à cette règle et de rémunérer un apport par un nombre inférieur ou supérieur de parts.

De même, en principe, les parts détenues par les associés confèrent des droits identiques (droit aux bénéfices sociaux et droit de vote), mais il est envisageable de créer des catégories de parts privilégiées, ou déclassées, conférant des droits plus importants ou des droits moindres. Par exemple, dans la perspective de la transmission du patrimoine, il peut être intéressant de créer des parts conférant un droit de vote double et/ou un droit préférentiel sur les bénéfices sociaux.

L'objet social

La SCI ne peut avoir qu'un objet civil. Si son activité devait être principalement commerciale, elle serait requalifiée en société commerciale de fait et basculerait à l'impôt sur les sociétés, ce qui pourrait avoir des conséquences importantes.

Voici quelques points de repères en ce domaine:

- la détention et la gestion d'immeubles pour son propre compte sont de nature civile;

- de même, la location immobilière est de nature civile quand bien même la société louerait à des tiers des locaux à usage commercial, par bail professionnel ou commercial;

- la location en meublé pourra être fiscalement regardée comme commerciale et donc entraîner un traitement des loyers comme des BIC et un assujettissement à l'IS, mais en principe elle n'entraîne pas de requalification de la SCI; l'insertion dans un bail commercial d'une « clause recettes », faisant dépendre le loyer du chiffre d'affaires, a pu parfois être analysée comme constitutive d'une activité commerciale pour le bailleur;

Enfin, l'achat d'immeubles par la SCI en vue de leur revente (activité de marchand de biens) est de nature commerciale; cela n'interdit nullement la revente occasionnelle de son patrimoine, par une SCI, à la condition que cela ne constitue pas son activité principale.

Les formalités de constitution

Ces formalités sont relativement simples et peu coûteuses : rédaction et enregistrement des statuts (des statuts très complets peuvent être téléchargés à faible prix sur Internet), publication d'un avis dans un journal d'annonces légales et inscription au registre du commerce et des sociétés. Il n'est pas nécessaire de faire rédiger les statuts par un notaire sauf si un immeuble devait être apporté au moment de la constitution. Toutefois, on conseillera de prendre l'avis d'un professionnel avant le dépôt des statuts surtout si des clauses particulières doivent être insérées, ceci afin de vérifier que le pacte social correspond bien à la volonté des fondateurs.

Gouvernance et rapports entre associés

Gérance

La SCI offre du point de vue de la gérance une grande liberté aux fondateurs. Il est possible de nommer un ou plusieurs gérants, pour une durée convenue, et suivant des modalités choisies (nomination dans les statuts, par l'assemblée générale, ou par une décision distincte).

Ce ou ces gérants peuvent être associés ou non, personne physique ou personne morale.

À cet égard on conseillera d'éviter la solution de la cogérance, complexe et source de conflits puisque chaque gérant peut engager la SCI de manière indépendante; on évitera également de nommer un gérant non associé, pouvant se muer en électron libre dont les actes vont engager la société, et donc les associés, directement sur leur patrimoine.

Les pouvoirs du gérant connaissent deux limites importantes : celle de l'objet social figurant dans les statuts, et celle des clauses statutaires fixant des limitations spécifiques (fréquemment, par exemple, l'interdiction d'emprunter une somme supérieure à un montant défini sans accord des associés).

Enfin, le gérant peut être révoqué par une décision majoritaire des associés. Si la révocation est dépourvue de justes motifs, le gérant pourra être indemnisé. Pour le cas où le gérant est majoritaire dans la SCI, la loi prévoit qu'il peut être révoqué pour cause légitime par tout associé.

Il est conseillé d'éviter la solution de la cogérance, complexe et source de conflits.

Décisions collectives

Le Code civil n'impose aucun formalisme aux décisions des associés; le plus souvent elles seront prises en assemblée générale, mais une consultation écrite est également envisageable. Les conditions de quorum, s'il en est, et de majorité, sont librement déterminées par les statuts.

Rapports entre associés

Signalons ici quelques points importants:

Les cessions de parts à des tiers sont obligatoirement soumises à l'agrément des autres associés (modalités librement prévues par les statuts) ; les cessions à d'autres associés ou à des membres de la famille proche sont en principe libres sauf disposition contraire dans les statuts; les associés, et c'est là une spécificité de la SCI, disposent d'un droit de retrait, c'est-à-dire du droit de demander à la SCI le remboursement de leurs droits sociaux.

Fiscalité

Les SCI relèvent par principe de l'impôt sur le revenu (IR). Ce système est caractérisé par le fait que les associés sont seuls redevables de l'impôt pour la quote-part des bénéfices sociaux leur revenant théoriquement.

Ainsi, si la SCI réalise un bénéfice imposable de 8 000 € (loyers perçus moins charges payées), l'associé qui possède 50 % du capital social sera imposé dans la catégorie des revenus fonciers à hauteur de 4 000 €, même si cette somme ne lui est pas distribuée. Cette somme s'ajoutera, le cas échéant, à ses autres revenus pour être soumise au barème progressif de l'IR (et aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %).

Si la SCI est déficitaire, la quote-part du déficit « revenant » à l'associé peut être imputée sur son revenu global (avec un plafond de 10 700 €), réduisant ainsi sa charge fiscale personnelle.

La SCI relève de l'impôt sur les sociétés (IS) de plein droit, si elle exerce une activité industrielle ou commerciale, ou encore si elle opte volontairement (et irrévocablement) pour ce régime.

L'IS se caractérise d'abord par une imposition du résultat au niveau de la société elle-même au taux unique de 26,5 %, avec la possibilité de bénéficier d'un taux réduit à 15 % pour la tranche de bénéfice imposable comprise entre 0 et 38 120 €. Le résultat net après IS peut ensuite, si l'AG le décide, être distribué aux associés. Ce dividende sera alors imposé entre leurs mains comme des revenus de capitaux mobiliers, c'est à dire avec un abattement de 40 % et un assujettissement au barème de l'IR avec les autres revenus. Ces dividendes sont en outre soumis à des prélèvements sociaux (CSG et RDS) au taux de 17,2 %.

Le régime des plus-values peut être affecté par le régime fiscal applicable à la SCI : l'éventuelle plus-value constatée lors de l'apport de l'immeuble (différence prix d'acquisition/valeur apportée) est imposée entre les mains de l'apporteur sans considération du régime fiscal de la SCI; la plus-value constatée en cas de cession de l'immeuble par la SCI est imposée, entre les mains des associés et au prorata de leurs droits dans la société, comme une plus-value immobilière si la SCI est à l'IR (taux de 19 % à compter de 2011 + prélèvements sociaux à 17,2 %), et comme une plus-value professionnelle si la SCI est à l'IS;

Enfin, la plus-value de cession des parts de la SCI par les associés est imposée comme une plus-value immobilière si la SCI est à l'IR (taux de 19 % à compter de 2011 + prélèvements sociaux à 17,2 %), et comme une plus-value de capitaux mobiliers si la SCI est à l'IS (au taux de 19 % + prélèvements sociaux de 17,2 % et sans application du seuil de cessions de 25 830 € supprimé par la loi de finances pour 2011).

Il n'est pas possible de dire, de manière générale, si le système de l'IR est plus ou moins avantageux que celui de l'IS. Tout au plus peut-on lister les paramètres à prendre en considération :

Le niveau d'imposition est important : l'IS connaît un taux fixe et l'IR un taux progressif; si la SCI a peu de revenus ou est déficitaire, l'IR apparaîtra souvent comme plus avantageux; plus la SCI générera de revenus, plus l'IS pourra permettre d'optimiser la charge fiscale; mais il faut également intégrer dans ce calcul les revenus personnels des associés, ce qui complique notablement le choix.

L'IR conduit à imposer les associés sur une quote-part théorique des bénéfices, c'est-à-dire sur une somme qu'ils ne perçoivent pas nécessairement au moment de l'imposition. À l'IS les associés ne sont personnellement imposés que sur les dividendes perçus;

Le régime des charges déductibles du revenu brut n'est pas exactement similaire : ainsi la rémunération du gérant associé ne sera pas déductible à l'IR. Les intérêts des comptes courants d'associés seront déductibles dans les deux régimes mais avec un plafond si la société est à l'IS. Enfin, et c'est un avantage indéniable, l'IS permet d'amortir le prix d'achat de l'immeuble et de déduire tous les frais d'acquisition;